Réforme de la cartographie en France – Aperçu historique

Au XVIIe siècle, le désir de tester de nouvelles hypothèses sur l’univers physique a stimulé les tentatives visant à déterminer avec précision les dimensions et la forme de la Terre, ce qui est devenu possible grâce à l’invention d’instruments plus précis permettant d’effectuer les observations nécessaires.

Parmi ceux-ci figuraient le télescope, l’horloge à pendule et les tables logarithmiques.

La mesure d’un arc à la surface de la Terre fut la première étape et, bien qu’il s’agisse principalement d’une opération géodésique, elle contribua finalement à l’avancement de la cartographie.

La première tentative valable pour déterminer la longueur d’un degré de cette manière a été faite par Snellius en Hollande en 1615, mais l’opération a d’abord été réalisée avec une approche précise en France, où, dans la seconde moitié du XVIIe siècle, il y avait une activité scientifique remarquable sous le patronage du « Roi Soleil », Louis XIV, et de l’Académie royale des sciences, fondée en 1666.

Dans ce pays, l’un des premiers États nationaux hautement centralisés d’Europe, la demande de cartes et de graphiques était en pleine croissance, et l’on se rendait compte qu’ils ne pouvaient être satisfaisants que s’ils reposaient sur un cadre scientifique précis.

Les cartes étaient nécessaires non seulement à des fins militaires, mais aussi pour l’organisation adéquate du vaste réseau routier, le développement des ressources internes (l’objectif d’hommes comme Colbert) et la promotion générale du commerce national et international.

Carte de France Dressee pour l'Usage du Roy, 1765
Carte de France Dressee pour l’Usage du Roy, 1765

Étapes de la création de la nouvelle carte de France

Les étapes successives de la réalisation de la nouvelle carte de France ont été les suivantes : (1) la mesure d’un arc du méridien de Paris par l’abbé Picard, en 1669-1670, à l’aide d’une chaîne de triangles ; (2) l’extension du méridien jusqu’à ce qu’il s’étende, en 1718, des Pyrénées à Dunkerque ; (3) les premières tentatives de production d’une nouvelle carte de la France en ajustant les levés existants, complétés par des observations de latitude et de longitude, au méridien de Paris ; (4) le levé planifié de l’ensemble du pays, de novo, basé sur un système complet de triangulation, qui a abouti au célèbre levé Cassini.

Cela avait été préconisé par Picard dès 1681.

Les quatre générations de la famille Cassini ont apporté une contribution remarquable à ces travaux.

Le premier, Jean Dominique, invité à travailler à l’observatoire de Paris en 1669, a participé à la détermination du méridien, mais son plus grand service à la cartographie a été de perfectionner une méthode de détermination de la longitude par l’observation des mouvements des satellites de Jupiter, une grande amélioration par rapport à la méthode des éclipses lunaires, même si l’erreur probable était d’un kilomètre.

Après les premiers travaux sur le méridien, il fut décidé d’appliquer les nouvelles méthodes à la rectification de la carte de France, et Picard, accompagné d’autres géomètres, dont La Hire, également connu pour sa projection, fut envoyé pour arpenter les côtes.

Une carte de La Hire, intégrant les résultats, fut présentée par ce dernier à l’Académie en 1684, puis publiée sous le titre « Carte de France corrigée par Ordre du Roi sur les Observations de Mrs. de l’Académie des Sciences », en 1693.

Elle montrait à la fois l’ancien et le nouveau tracé des côtes, le résultat général étant de déplacer l’extrémité occidentale de la France d’un degré et demi de longitude vers l’est, par rapport au méridien de Paris, et la côte sud d’environ un demi-degré de latitude vers le nord.

La vue de cette carte aurait incité Louis XIV à remarquer que le levé lui avait coûté plus de territoire qu’une campagne désastreuse.

Le deuxième Cassini, Jacques, réalisant que toute tentative d’ajuster des levés aléatoires au méridien de Paris serait insatisfaisante, devint le défenseur de la triangulation complète de la France et, avec son fils, César François Cassini de Thury, s’engagea dès 1733 dans cette extension. La colonne vertébrale de la triangulation était le méridien de Paris « vérifié ».

Le long de celui-ci, à des intervalles de 60 000 toises (un peu plus d’un degré de latitude), des perpendiculaires ont été tracées géométriquement vers l’est et l’ouest, à partir desquelles les positions des villes et autres points importants ont été fixées.

C’est ainsi qu’est née la projection aujourd’hui connue sous le nom de Cassini, dans laquelle les coordonnées d’un point sont données par rapport à un méridien central et à la distance le long du grand cercle passant par la position qui coupe le méridien à angle droit.

Les travaux ont débuté en 1744 avec la « Nouvelle carte qui comprend les principaux triangles qui servent de fondement à la description géométrique de la France ».

Cassini de Thury avait réussi à obtenir le soutien du gouvernement pour le projet de carte topographique sur cette base, et les travaux ont commencé en 1747 aux frais de l’État. Neuf ans plus tard, cependant, ce projet a été abandonné en raison des dépenses militaires importantes.

Cassini a immédiatement pris l’initiative audacieuse d’assumer l’entière responsabilité du levé. Il obtint l’autorisation de créer une association pour financer son achèvement, obtint le soutien nécessaire, en partie auprès de divers États généraux provinciaux qui appréciaient la valeur de cartes précises de leurs provinces, et mena le projet presque à son terme.

À sa mort en 1784, seule la Bretagne restait à publier.

Finalement, après une suspension pendant la période révolutionnaire, le travail fut repris par l’État et achevé en 1818. Cassini a donné tous les détails de l’entreprise dans sa « Description géométrique de la France », publiée en 1783.

Instruments et techniques

Les améliorations apportées aux instruments ont grandement contribué à l’amélioration de la qualité des cartes. Les demi-cercles horizontaux divisés en laiton étaient équipés d’alidades télescopiques, et la lecture au micromètre permettait d’observer les angles avec une grande précision. Des balises, et parfois des feux, étaient utilisés comme repères d’observation.

Les détails topographiques étaient traités de manière plus sommaire : bien que la table plane fût couramment utilisée par les « ingénieurs géographes », le corps des géomètres militaires, les hommes de Cassini qui effectuaient les triangulations mineures esquissaient les détails par estimation ou par pas, et les retravaillaient au bureau. Souvent, ils se contentaient d’indiquer les pentes par les lettres D ou F (« douce » ou « forte »).

Une fois achevée, la carte Cassini comprenait 182 feuilles (88 x 55,5 cm).

L’échelle était de 1:86 400 (soit 1 pouce pour 1,36 mile). Son style s’inspire d’une carte de la région parisienne réalisée en 1678, au début de la détermination du méridien, par Du Vivier et gravée par F. de la Pointe.

Elle est soigneusement gravée, l’effet général étant net et épuré ; les grandes « routes » menant à Paris sont mises en évidence et nommées, les grandes villes sont représentées en plan, et divers symboles indiquent les petites agglomérations, les églises, les moulins à vent et à eau, les potences et autres ouvrages humains. Les forêts, avec leurs sentiers soigneusement dessinés, sont bien visibles, tout comme les résidences de la noblesse et de la gentry, avec les noms de leurs propriétaires.

Ce n’est que dans la représentation du relief que la carte présente des lacunes notables. Dans les zones de moindre altitude, les rivières et les ruisseaux sont représentés comme s’écoulant dans des vallées étroites dont les limites sont hachurées, et les élévations isolées ne sont représentées que de manière occasionnelle ; l’effet général est donc celui d’un vaste plateau plat découpé par des vallées en forme de canyons.

Dans le sud et le sud-est, plus accidentés, le résultat est encore moins satisfaisant ; le terrain est représenté en deux ou plusieurs niveaux avec les hachures habituelles, et les longues crêtes apparaissent sous forme de bandes blanches étroites.

Les reliefs de toute zone importante apparaissent ainsi curieusement désintégrés. Il faut toutefois se rappeler que ce n’est qu’après de nombreuses années que l’on a disposé de données suffisantes sur l’altitude pour représenter le relief avec précision.

Quels que soient ses défauts, cette carte est un monument remarquable dans l’histoire de la cartographie, qui a influencé la cartographie de nombreux pays. Ce n’est qu’un demi-siècle après sa création qu’une entreprise comparable a été lancée en Grande-Bretagne par l’Ordnance Survey.

C’est d’ailleurs à l’initiative de Cassini de Thury que le général Roy fut chargé de coopérer à la triangulation transmanche de 1787, ouvrant ainsi la voie à la création de l’Ordnance Survey.

Cartographie générale en France et observations externes

Après avoir retracé l’histoire du levé Cassini, nous pouvons maintenant examiner les progrès de la cartographie générale en France. La méthode de J. D. Cassini pour déterminer la longitude a été utilisée très tôt pour fixer des positions en dehors de la France.

Dans le but principal d’améliorer les cartes marines existantes, des observateurs ont été envoyés à partir de la fin du XVIIe siècle dans divers pays d’Europe, en Guyane française, aux Antilles, en Afrique et en Asie du Sud et de l’Est, où des valeurs remarquablement précises ont été obtenues au fil du temps.

À partir des observations de Richer, par exemple, la longitude de Cayenne a été déterminée à un degré près de sa valeur réelle.

Les premiers résultats ont permis à J. D. Cassini, en 1682, d’esquisser son célèbre planisphère, qui comprenait quarante déterminations, sur le sol de l’observatoire de Paris. Celui-ci a ensuite été gravé sous le titre « Planispherum terrestre », dont un exemplaire est connu depuis 1694.

Ces nouvelles observations ont également servi de base à une collection de cartes marines couvrant, sur la projection de Mercator, les côtes occidentales de l’Europe, de la Norvège à l’Espagne ; il s’agit de « Le Neptune francois, ou Atlas nouveau des cartes marines… Revue et mis en ordre par les Sieurs Pene, Cassini et autres », Paris, 1693.

Guillaume Delisle et la « réforme de la cartographie »

L’homme qui a présenté ce nouveau travail au grand public, et qui a ainsi réalisé ce que l’on a appelé la « réforme de la cartographie », était Guillaume Delisle (1675-1726).

Guillaume était le fils de Claude Delisle, un professeur d’histoire et de géographie célèbre à son époque, à qui son fils devait sans aucun doute une grande partie de son instruction et de son aide dans ses premières entreprises.

Le fils a également bénéficié de l’enseignement de l’astronomie dispensé par Cassini à l’Académie, dont il est devenu membre associé en 1718.

En 1700, Delisle a commencé à travailler comme compilateur et éditeur de cartes, et pendant le reste de sa vie, il a été le leader du progrès cartographique avec une réputation internationale. Dans ses cartes et ses globes, il a suivi avec compréhension les progrès des travaux de l’Académie.

Parmi ses premières productions figure la « Mappe-Monde Dressée sur les Observations de Mrs de l’Académie Royale des Sciences », 1700, une carte en deux hémisphères sur la projection stéréographique, qui poursuit les améliorations du « Planispherum terrestre », et dont des versions modifiées ont été publiées de temps à autre (par exemple en 1724 et 1745).

Si on la compare à une carte moderne, on constate que les contours des continents sont extrêmement précis. L’Afrique est particulièrement bien dessinée et correctement placée en latitude et en longitude. L’Amérique du Sud est également bien placée, mais comme l’Amérique du Nord, elle est encore trop étendue en longitude.

La principale zone pour laquelle les informations font manifestement défaut est le nord du Pacifique, où Yezo (Hokkaido) n’est pas encore clairement distingué du continent, et où les idées sur la mythique « Terre de la Compagnie » et le « détroit d’Anian » continuent de tourmenter le cartographe.

Mais si les contours des continents étaient désormais connus en grande partie avec une précision considérable, l’intérieur des continents en dehors de l’Europe était encore composé de demi-vérités, d’imagination et de tradition.

En traitant ces zones, Delisle prit une autre décision, car il était prêt à admettre, par des « blancs sur la carte », les limites des connaissances contemporaines.

En Afrique, par exemple, il abandonna le système des lacs centraux hérité du XVIe siècle et montra que le bras principal du Nil prenait sa source en Abyssinie. Il fit preuve du même esprit critique ailleurs.

Comme de nombreuses informations, en particulier sur l’Asie, reposaient encore sur l’autorité des auteurs grecs et latins, il consacra beaucoup de temps et de réflexion à déterminer les équivalents des anciennes mesures de longueur.

Comme il manquait de capitaux et donc de l’aide de graveurs qualifiés, les cartes de Delisle ne sont pas remarquables par leur exécution, mais elles sont exemptes des monstres mythiques et autres artifices avec lesquels les cartographes plus anciens dissimulaient leur ignorance ou attiraient leurs clients. À cet égard, Delisle marque à nouveau la transition vers la carte moderne.

Sa production totale n’était pas très importante, environ 100 cartes, par rapport aux éditeurs de cartes du XVIIe siècle, et une grande partie de son travail était destinée à accompagner des ouvrages de voyage ou de topographie, car une carte de Delisle était considérée comme un gage de distinction.

Il semble avoir étendu cette simplicité de style à la représentation du relief ; il avait certainement raison de s’opposer à certains styles de dessin des montagnes, censés rehausser l’attrait d’une carte, mais son principe fondamental était juste : « L’une des principales exigences d’un géographe est de marquer clairement les rivières et les montagnes, car ce sont les limites naturelles qui ne changent jamais et qui conduisent naturellement à la découverte des vérités géographiques. »

D’Anville et l’avancée critique

L’amélioration de la carte du monde initiée par Delisle a été poursuivie et considérablement étendue par J. B. Bourguignon d’Anville (1697-1782).

Son talent résidait dans l’évaluation critique et la corrélation des sources topographiques anciennes, et leur conciliation avec les observations contemporaines.

Il était essentiellement un érudit, travaillant principalement à partir de textes écrits, qu’il comparait avec les cartes existantes, et exprimant ses conclusions sous forme cartographique.

Tout au long de sa vie, il n’a jamais voyagé au-delà des environs de Paris. Sa vaste collection de documents cartographiques (10 à 12 000 pièces) était célèbre.

Acquise par le gouvernement français peu avant sa mort, elle se trouve aujourd’hui à la Bibliothèque nationale de Paris.

Son talent et son travail étaient tels qu’il acquit rapidement une réputation internationale en tant que cartographe à une époque où les études classiques dominaient encore le monde du savoir. D’Anville fut en fait le dernier, et peut-être le plus grand, de ceux qui, depuis la Renaissance, avaient suivi cette procédure, et il l’a probablement poussée aussi loin que possible.

Il fut l’un des premiers à étudier les œuvres des écrivains orientaux pour obtenir des détails sur les pays de l’Est. Seules l’exploration et l’étude réelle de l’intérieur des continents pouvaient permettre d’atteindre une plus grande précision.

La première marque de reconnaissance lui fut accordée par la Compagnie de Jésus, qui lui confia la préparation de la publication des études sur les provinces de Chine, auxquelles les membres de l’ordre travaillaient depuis la fin du XVIIe siècle.

Dans de nombreux cas, ces relevés étaient basés sur des observations astronomiques pour déterminer la position, mais dans d’autres, il s’agissait simplement de relevés d’itinéraires.

Grâce à ces cartes, l’Europe occidentale obtint pour la première fois une conception raisonnablement précise et complète de la géographie d’une grande partie de l’Asie orientale. À l’aide de ces relevés sectoriels, D’Anville compila une carte générale de l’Empire de Chine.

Les cartes, au nombre de quarante-six sur soixante-six feuilles, accompagnaient la « Description géographique » de l’Empire chinois compilée par J. B. du Halde à partir des rapports des jésuites, et furent ensuite publiées à Amsterdam sous le titre « Nouvel Atlas de la Chine », en 1737.

Une édition anglaise de Du Halde avec des versions des cartes parut en 1738-41. D’Anville participa à cet atlas en tant que compilateur, mais l’efficacité de sa méthode de travail générale fut démontrée par sa carte de l’Italie, publiée en 1743, basée sur une étude critique des itinéraires romains et des mesures de longueur.

Il en résulta une réduction de la superficie de la péninsule de « plusieurs milliers de lieues carrées », et l’exactitude de ses déductions fut confirmée de manière frappante par les observations géodésiques effectuées plus tard dans les États de l’Église sur ordre du pape Benoît XIV.

Les cartes les plus remarquables de D’Anville sont celles des continents : Amérique du Nord, 1746 ; l’Amérique du Sud, 1748 ; l’Afrique, 1749 ; l’Asie, 1751 ; l’Europe, en trois feuilles, 1754-1760 ; et une carte générale du monde en deux hémisphères, 1761.

Les contours et les positions des continents, basés sur les mêmes données, différaient peu de ceux de Delisle ; leur mérite réside dans le traitement des intérieurs.

Sur la carte de l’Afrique, par exemple, D’Anville est allé bien au-delà de Delisle en supprimant la topographie conventionnelle et largement fictive, et sa représentation est restée valable jusqu’à ce que les grands voyages du XIXe siècle inaugurent une nouvelle ère dans la cartographie africaine.

D’Anville a considéré à juste titre que le Nil Bleu, qui prend sa source dans les hautes terres d’Abyssinie, n’était pas le principal affluent du Nil.

Refusant de rompre complètement avec les idées de Ptolémée, il a représenté le fleuve principal comme jaillissant de deux lacs dans les Montagnes de la Lune, à 5° de latitude nord et environ 27° 30′ de longitude est.

Le coude vers le nord du Niger est bien visible, mais il est décalé de 3° trop vers le nord, et le fleuve est tronqué à l’ouest.

À l’est, il est relié à ce qui pourrait être le lac Tchad. Dans une note, D’Anville indique qu’il y avait des raisons de supposer, contrairement à l’opinion courante, que le grand fleuve coulait d’ouest en est.

Ailleurs, sauf dans le nord, les détails se limitent presque entièrement aux zones côtières.

Une autre œuvre célèbre est sa carte de l’Inde publiée en deux feuilles en 1752, la meilleure carte du sous-continent avant les travaux du major James Rennell et du Survey of India. D’Anville a publié des cartes révisées à mesure que les détails des explorations contemporaines lui parvenaient.

En 1761, elles ont été publiées sous forme d’atlas, et des rééditions modifiées ont paru jusqu’au début du XIXe siècle. Il accordait une grande importance au dessin et à la gravure — les inscriptions sont claires et attrayantes — et, à cet égard, ses cartes sont largement supérieures à celles de Delisle et à la plupart des productions de son siècle.

Mais sa plus grande contribution à la cartographie tient peut-être à la manière dont il a appliqué son propre précepte : « Détruire de fausses opinions, sans même aller plus loin, est un des moyens qui servent au progrès de nos connaissances ».

Représentation du relief : Buache, Gyger et les hachures

L’œuvre de D’Anville fut poursuivie par son gendre, Philippe Buache, qui contribua à mettre au point une méthode plus satisfaisante pour représenter le relief sur les cartes topographiques, un problème qui retenait beaucoup l’attention à cette époque.

Sur les premières cartes gravées, les collines et les montagnes, à peine différenciées, étaient généralement représentées de profil, parfois avec un ombrage sur un côté.

Ces symboles sont souvent appelés « taupinières » ou « pains de sucre ».

L’étape décisive a été le passage de la représentation des chaînes de collines ou de montagnes comme des éléments séparés et isolés à la représentation de la configuration de la surface comme un tout intégré.

Un exemple intéressant de cette évolution est la carte de la haute vallée du Rhin dans le Ptolémée de Strasbourg de 1513.

Sur cette carte, les escarpements des vallées sont ombrés et les vallées tributaires sont incisées dans les hautes terres, qui sont toutefois représentées avec une surface uniformément plane.

Dans des pays comme la Suisse, les premières tentatives s’apparentaient davantage à des dessins en perspective oblique ; à mesure que la science de l’arpentage se développait, des efforts ont été faits pour représenter la superficie réelle occupée par une chaîne de montagnes.

Combiné au profil, cela produisait un effet tridimensionnel.

L’une des méthodes les plus efficaces pour rendre le relief a été mise au point par le cartographe suisse Hans Konrad Gyger (1599-1674).

Dans ses cartes des cantons suisses, il a tenté de représenter la surface du terrain comme si elle était vue d’en haut, en travaillant les plis et les creux par un ombrage minutieux et en laissant les zones plus élevées intactes.

Son savoir-faire, combiné à sa connaissance approfondie du pays, a produit un effet plastique remarquable, même s’il ne pouvait rendre compte que des différences d’altitude relatives, et non absolues.

Le fait que sa méthode ne semble pas avoir été généralement suivie est sans doute dû au manque de données adéquates.

Pendant au moins un siècle, la représentation du relief s’est généralement limitée à l’ombrage des versants des vallées à une distance plus ou moins uniforme des rivières.

Ce style est utilisé, par exemple, dans la carte des environs de Paris réalisée par les membres de l’Académie des sciences et gravée par La Pointe en 1678.

Même sur les feuilles du levé Cassini, soixante-dix ans plus tard, aucun progrès significatif n’avait été réalisé, et le résultat est bien inférieur à celui obtenu par Gyger.

La méthode du hachurage, qui consiste à indiquer le relief par des lignes (hachures) orientées dans le sens de la pente la plus forte, est peut-être un développement de cette pratique.

Le principe a été pleinement développé au cours du XVIIIe siècle pour répondre aux besoins des commandants militaires. J. G. Lehman, par analogie avec les ombres projetées par une lumière zénithale, a proposé la théorie selon laquelle plus l’inclinaison de la surface par rapport à l’horizon est grande, plus le hachurage doit être intense, et il a élaboré une échelle systématique pour l’épaisseur des traits.

Le hachurage présente toutefois plusieurs défauts : s’il est réalisé de manière élaborée, l’ombrage intense masque une grande partie des autres détails de la carte et ne permet pas à lui seul de donner une valeur absolue pour la différence d’altitude entre un point et un autre.

De plus, sans référence à d’autres éléments, il est difficile de distinguer les élévations des dépressions.

Les courbes de niveau (contours) et leur développement ultérieur

La solution généralement employée aujourd’hui est la courbe de niveau, c’est-à-dire une ligne passant par tous les points d’une altitude donnée. Contrairement au hachurage, elle suit la pente et ne la descend pas.

L’origine des contours reste quelque peu obscure.

Une courbe de niveau évidente est la ligne de haute ou de basse mer, et il n’est donc pas surprenant qu’elle semble avoir été développée aux Pays-Bas, d’abord pour montrer la configuration du fond marin.

Les sondages au large des côtes et dans les estuaires sont courants sur les cartes du XVIe siècle, sur lesquelles les bancs sont également entourés de lignes brisées.

Il ne serait pas très difficile de tracer ces lignes à travers les sondages indiquant une profondeur d’eau donnée.

Cela semble avoir été la pratique au début du XVIIIe siècle, époque à laquelle le nombre de sondages avait considérablement augmenté.

Sur une carte de l’estuaire de la Merwede (1729), N. S. Criscnstal, un ingénieur néerlandais, a indiqué les profondeurs par des lignes de sondages égaux, se référant à un niveau commun. Peu après, Philippe Buache a dessiné une carte bathymétrique de la manche, avec des courbes sous-marines à intervalles de dix brasses, mais cette carte n’a été publiée dans les Mémoires de l’Académie de Paris qu’en 1752.

En 1737, il avait soumis à l’Académie une carte de Fernao da Noronha avec des courbes sous-marines, accompagnée d’une coupe verticale à travers un banc éloigné.

Comme il participait également à des opérations de nivellement à Paris, il a dû reconnaître l’applicabilité de la méthode des courbes de niveau aux surfaces terrestres.

Sa première utilisation sur terre est toutefois généralement attribuée à Milet de Mureau, qui, vers 1749, utilisa des lignes d’altitude égale sur ses plans de fortifications.

Le XVIIIe siècle fut une période très active dans la construction de canaux, et il est donc fort probable que les ingénieurs responsables de ces travaux aient découvert ce principe de manière indépendante, tout comme Charles Hutton l’avait fait en 1777 lorsqu’il cherchait une méthode pour déterminer la masse du Schiehallion, une montagne en Écosse.

L’utilisation générale de cette méthode dans les cartes de grandes zones a été retardée par le manque de données suffisantes, bien que Cassini et d’autres en France aient calculé certaines altitudes par triangulation et par baromètre.

La première carte britannique à inclure des altitudes ponctuelles semble être la « Physico-chorographical chart » (carte physico-chorographique) du Kent, réalisée par Christopher Packe en 1743.

Packe a obtenu ses altitudes en comparant les lectures barométriques. Les hauteurs ponctuelles étaient fréquemment utilisées avant la fin du XVIIIe siècle, par exemple dans l’Atlas de la Suisse de Mayer, 1796-1802.

L’un des premiers exemples d’utilisation de courbes de niveau pour une zone considérable est la carte de Dupain-Triel, La France considérée dans les différentes hauteurs de ses plaines.

Cette carte prétend montrer la France avec des courbes de niveau à intervalles de dix toises (environ soixante pieds), mais la représentation est largement influencée par ses idées sur les relations ordonnées entre les montagnes et les plaines.

Aucun nivellement général n’avait été effectué à cette date, de sorte que ses courbes de niveau étaient largement théoriques, mais un certain nombre d’altitudes de sommets sont indiquées, certaines avec une précision considérable, en particulier celle du Mont Blanc, et il a ajouté une coupe verticale à travers la France.

Dupain-Triel a élaboré ses méthodes et préconisé leur adoption dans l’enseignement dans son ouvrage « Méthodes nouvelles de nivellement », publié en 1802.

Ainsi, au début du XIXe siècle, la méthode commençait à être connue et, avec le lancement des grands levés nationaux au cours des décennies suivantes, elle est entrée dans l’usage général.

Une étape supplémentaire, consistant à colorer les zones entre les courbes de niveau successives selon une échelle de teintes donnée, a été franchie dans le « Handatlas » de Stieler, publié en 1820.

Cette stratification hypsométrique permet de se faire rapidement une idée générale du relief d’une vaste zone. L’intérêt des courbes de niveau réside dans le fait que, contrairement au hachurage, elles permettent de déterminer l’altitude d’un point particulier avec une grande précision, car les hauteurs entre les courbes peuvent être estimées avec de la pratique.

Cependant, elles ne permettent pas toujours de se faire rapidement une idée du relief, et les caractéristiques topographiques mineures entre les courbes ne sont pas enregistrées.

C’est pourquoi il est souvent associé à des hachures ou à un ombrage. En 1931, les courbes de niveau, les hachures et la coloration des couches ont toutes été utilisées par l’Ordnance Survey dans la cinquième édition (relief physique) de la carte au 1/100 000.

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